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Rapport sur la propagande de la LICA par Lazare Rachline

Correspond à la page : 79

Note de l'auteur

Document non daté, mais très probablement établi en 1929 ou au tout début des années 1930.

Retranscription

Rapport sur la Propagande

La propagande de la Ligue Internationale contre l’Antisémitisme a consistée dans ses débuts, à former des sections, à recruter des adhérents.

Il fallut préparer des réunions, trouver des sympathisants susceptibles de former les cadres des sections, délimiter enfin les sections elles-mêmes.

Ce fut, je dois le dire assez facile, notre première réunion se tint à St Ouen où le même soir fut formée la 1ère section.

Grâce aux concours et aux dévouements inlassables de nos admirables amis qui sont aussi d’excellents orateurs, nous avons en quelques semaines amenés à notre mouvement suffisamment d’adhérents pour que la LICA devienne enfin assez forte pour songer à s’organiser sur des bases solides et permettant une action puissante de plus en plus efficace.

Il faut le dire, et on ne saurait trop le répéter combien le développement rapide de la LICA doit à des hommes comme notre président Bernard Lecache, présent à toutes les formations de section, apportant avec son inlassable dévouement, son admirable talent d’écrivain et d’orateur au service de la cause que nous défendons.

Et puis, tous les ouvriers de la première heure.

Simon Goldenberg, toujours là, Emile Franck secrétaire général infatigable et excellent orateur dont le concours précieux nous fut toujours acquis, Mademoiselle Corot apportant à nous tous son bel enthousiasme et sa foi dans un monde meilleur à chaque réunion où nous la conviions, Julien Braun, Sam Schvitza, Marcel Feder, Chemaun ( ?), Weissudu ( ?) et d’autres que je prie de m’excuser si je ne les cite pas, mais ils sont trop nombreux.

Oui, je le répète la propagande fut assez facile avec des camarades comme ceux-là, et c’est avec eux que nous avons formé jusqu’au congrès fédéral, toutes les sections qui allaient constituer la fédération de la Seine.

En quoi consistait la propagande ? Comment fut-elle faite ?

Par tous les moyens, affiches, distribution de tracts, préparation de réunions publiques, recherches des personnes capables de diriger les sections, recrutement intensif.

Chacun fit son devoir, à chaque réunion du comité central, c’était une dizaine de réunions prévues, que ce soit à St Ouen, dans le 4e à Montreuil à Pavillons sous-bois ou ailleurs tous les camarades pressenties acceptaient toujours avec bonne grâce de participer au travail de préparation, et étaient toujours prêts pour la propagande.

Et puis, ce fut l’école du propagandiste notre pépinière d’orateurs, le centre duquel nous allions où nous avons trouvé de nouveaux dévouements, et des intelligences nouvelles, qui allaient et qui vont aider la LICA à parvenir aux buts qu’elle s’est tracés.

L’école du propagandiste devra devenir dans l’année qui va suivre, une véritable école non seulement d’orateurs mais aussi d’organisateurs.

Jusqu’à présent en effet, les orateurs, ou plutôt les conférenciers qui ont enseigné à notre école, ont surtout contribué à former la culture intellectuelle de nos élèves, ils ont fait des cours, qui ont meublé les cerveaux de substances spirituelles, il nous faudra désormais intercaler des cours de formation de section, de discipline à observer dans le service d’ordre pour la police des meetings, de méthode pour l’affichage et la distribution des tracts, et puis aussi de présentation discours passe partout pour la propagande dans tous les domaines de l’activité politique et sociale.

Il faut dire que la fédération de la Seine nous fut d’un précieux secours, dans notre propagande.

Des hommes comme Simon Goldenberg, Manzon, Rudin, Ollier et combien d’autres, que nous ne connaissions pas, sont venus à nous dans un bel élan d’enthousiasme et ont été et sont encore des piliers solides pour la LICA.

C’est avec tous ces éléments que nous avons pu réussir nos meetings, où l’ordre n’a cessé de régner.

Dans la salle Wagram, où furent tenus 4 immenses meetings, où des milliers de personnes ne purent entrer, nous n’avons eu à déplorer aucun incident. Notre service d’ordre, objet de l’admiration des plus pointilleux, fut vraiment parfait et remplit son devoir avec la plus complète abnégation, sans souci des vanités peu glorieuses qui accompagnent dans d’autres organisations, les dévouements intéressés.

Pour les orateurs, le soin de les inviter à participer à nos protestations, fut toujours confié à plusieurs camarades, qui abandonnant leurs occupations, s’empressaient de toucher des personnalités parfois difficiles à rencontrer. Là encore, nous pouvons affirmer sans fausse modestie, que nous avons eue à nos meetings des orateurs de premier ordre, et que le service de la propagande a bien travaillé.

Il y a des hommes qui ont apporté à l’essor de la LICA, le dynamisme de leur forte personnalité, notre propagande s’en est trouvée renforcée et notre action s’en est élargie.

Parmi ceux-là, le plus cher à notre cœur, c’est Georges Pioch, qui toujours a répondu à notre appel, qui est venu prendre la parole à des réunions de sections comme dans le 12e et à Pavillons sous-bois, qui nous a fait de si beaux cours à l’école du propagandiste.

Et il y aussi les besognes obscures, mais qui sont les plus nécessaires.

C’est Sam Schvitza collant des affiches dans les rues de Paris, ce sont les camarades fraternels de la fédération portant de rue en rue, de maison à maison, de personne à personne les tracts de la LICA, ce sont Simon Goldenberg et Yvonne Montrobert, Feder et Schvitza allant chercher dans tous les restaurants, dans tous les centres des emplacements pour nos affiches.

Et puis aussi les courses dans les journaux pour l’insertion de nos communiqués.

Les démarches dans les ambassades où s’affirme de plus en plus l’importance de la Ligue.

Ce furent aussi la formation de la section de Lyon due à notre camarade adhérent Lutzski, la formation de la section du Mans due à notre camarade Nozel.

Les voyages de Simon Goldenberg, Marcel Feder et Poireau et la formation des sections de l’Est de la France.

La réunion de propagande de Lyon où prirent la parole Lecache, Franck et Rachline.

La formation de la magnifique section de Lille où Lecache prit la parole en deux réunions successives.

Et puis, et puis tout ce que nous oublions, tous les dévouements magnifiques et anonymes, les sections des Lilas du Pré St Gervais et combien d’autres ?

Mais est-ce que nous devons être contentes des résultats ?

Non.

Rien n’est fait tant qu’il y a encore quelque chose à faire.

Et nous n’avons que commencé, et nous aurions pu mieux commencer mais nous devons à la cause sacrée que nous défendons de mieux continuer.

Et tout d’abord, il faut que la propagande de la LICA soit faite par tous les membres qui la composent.

Tous les ligueurs doivent à la Ligue de la faire connaître, de parler d’elle de la faire aimer, de l’aimer, de faire adhérer les sympathisants qui hésitent encore.

Il faut réorganiser l’école du propagandiste en laquelle nous mettons tant d’espoirs.

Nous proposons pour l’année qui vient la méthode suivante pour les trois premiers mois :

formation d’une culture du ligueur par des cours de philosophie ayant trait à l’étude de la psychologie et de la logique, avec pour réunion finale, un cours d’autocritique entre élèves.

2 réunions pour apprendre aux élèves à former des sections, comment on distribue des tracts, comment on colle des affiches, les personnes qu’il faut faire adhérer.

2 réunions pour apprendre à faire un discours omnibus qui puisse servir la Ligue partout où un ligueur se trouver.

2 mois, cours d’histoire et de matérialisme historique, et puis enfin selon les possibilités de professeurs cours de sciences morales et politiques sans oublier un ou deux cours sur le sionisme, sur le socialisme et sur judaïsme et christianisme.

Quant à la méthode qui consiste à faire discuter les cours précédents par un élève qui veut bien accepter ce rôle, je ne la trouve bonne qu’à la condition que cet élève soit choisi par le directeur de l’école.

Il faudra aussi constituer une équipe de distributeurs de tracts, et régulariser l’équipe du service d’ordre.

On pourra enfin demander aux sections d’exiger de leurs membres qu’ils fassent adhérer au moins un nouveau membre par mois.

Il ne faut pas oublier que sans la propagande, une organisation ne peut rien faire d’important.

La propagande a pour but de nous faire connaître, mais surtout de créer un état d’esprit, de faire comprendre et adopter nos idées, des combattre ou d’entraver celles de nos ennemis.

En résumé, de façonner l’opinion publique, de faire l’éducation des masses.

Ne pas faire de propagande c’est laisser le champ libre à nos ennemis, c’est leur abandonner le soin d’éduquer les ignorants et d’en faire nos adversaires.

Mais sans doute la propagande coûte cher, oui c’est vrai, aussi faut-il dans une organisation comme la nôtre, la réduire au point de vue financier, tout en l’étendant dans le domaine public.

Comment concilier ce qui semble une contradiction ?

En employant d’abord les moyens de propagande qui portent le plus, en les examinant l’un après l’autre et en employ éliminant ceux qui parfois coûtent plus cher sans nous rapporter le bénéfice de nouvelles adhésions ou d’une autorité plus influente grande.

Voyons donc, les principaux moyens de propagande.

Nous avons : l’affiche, la conférence, la presse, le livre, le tract, l’action directe.

L’affiche est indispensable dans la préparation des meetings, en même temps qu’elle appelle les gens à protester avec nous, elle fait connaître nos mots d’ordre, elle frappe les esprits par une formule lapidaire, elle oblige même les indifférents à nous connaître, à connaître notre action. Elle est le plus public des moyens de propagande, et aucune réunion de quelque importance ne peut s’en passer. Son prix est assez élevé mais, mais il est toujours compensé par le nombre de personnes attirées à notre mouvement. Il est bon de faire des affiches de grand format pour nos grands meetings, et il semble que la couleur la plus voyante et aussi la plus facile pour lire soit le jaune avec des lettres noires. On pourrait également pour les petites réunions de sections préparer des petites affiches avec le lieu et la date de la réunion en blanc.

La conférence est le moyen le moins coûteux et peut-être aussi le plus efficace. L’orateur contribue pour une part importante au succès de l’organisation.

S’il sait présenter son sujet, s’il apporte un peu de passion, il exerce alors sur ses auditeurs une sorte d’attraction, de séduction qui les oblige à le suivre dans la voie où il les entraîne, c’est-à-dire l’adhésion qui doit toujours rester notre but immédiat.

Le discours est sans doute la forme la plus importante et aussi la plus attachante de la propagande.

Mais la conférence comporte certaines difficultés, il faut non seulement parler mais encore répondre aux interrupteurs et à ceux qui posent des questions et aussi aux contradicteurs, il faut même aller porter la contradiction. Ce sera l’œuvre de notre école du propagandiste de former des orateurs capables de remplir ce rôle honoré et redoutable.

La presse ne nous coûte rien, que d’aller porter des communiqués dans les salles de rédaction. Et c’est aussi un puissant moyen de propagande. Nous avons également dans notre sein des hommes comme Bernard Lecache, Charles Lussy, Georges Pioch, qui nous ont rendu des services qu’il est inutile de souligner, en publiant des articles en faveur de notre action dans des journaux qui nous sont sympathiques.

Il faudra nous efforcer d’avoir dans le milieu journalistique le plus de relations possibles pour avoir avec nous dans la mesure du possible, cette force considérable qu’est la presse.

Le livre est un moyen précieux de faire connaître la raison même de notre existence et la nécessité de notre activité.

Les deux livres de Lecache, Quand Israël meurt et Les porteurs de croix apportent la preuve formelle de l’assassinat collectif des Juifs. Il faudra aussi éditer des brochures qui expliqueront nos buts et la manière et décrirons la misère des Juifs persécutés.

Mais il ne nous est pas possible pour le moment du moins, d’envisager ce moyen.

Il ne nous est pas possible en effet de couvrir les frais que comporte l’édition de livres. Aussi devons-nous nous contenter pour le moment de recommander Quand Israël meurt et Les porteurs de croix.

Ces deux livres peuvent faire beaucoup pour notre mouvement et ils sont toujours d’actualité.

Nous en avons d’ailleurs dans notre librairie et il sera excellent de continuer à les vendre comme nous avons déjà fait.

Le tract n’est pas très coûteux mais il est moins nécessaire que l’affiche.

Il est cependant indispensable pour la formation des sections et le recrutement des adhérents.

Comme il peut être lu plus à loisir que l’affiche, il peut comporter plus d’explications.

Mais il est absolument nécessaire qu’il soit composé par le Comité Central.

Trop souvent des camarades, bien intentionnés certes, mais connaissant mal le français l’ont rendu sinon illisible, du moins parfaitement ridicule, il faudra donc toujours en soumettre le texte au C.C.

J’en arrive au moyen le plus simple, le plus facile et le plus efficace aussi de la propagande.

L’action directe ne coûte rien.

Chaque adhérent peut devenir bénévolement et sans grand dérangement devenir un agent actif de notre propagande.

Dans les relations personnelles par la persuasion, dans l’atelier par la camaraderie, dans les sociétés de jeunesse ou autres par une petite conférence, chacun peut apporter à la Ligue un concours souvent plus obscur mais toujours plus utile que par n’importe quel autre moyen.

Dans les bals de nuit organisés pendant l’hiver, un ligueur qui se sent capable de parler quelques minutes de notre action, de nos idées, de nos buts, ne doit pas hésiter.

Il doit demander la parole au président qui ne la lui refusera jamais, il doit avec des camarades faire circuler des bulletins d’adhésions. Et puis surtout, un bon propagandiste ne doit pas avoir peur de se répéter. C’est en répétant toujours la même vérité qu’on arrive à la graver dans les esprits.

Et maintenant au travail, je crois avoir indiqué succinctement les moyens les plus économiques de nous imposer en nous faisant connaître toujours davantage et en faisant connaître aussi de plus en plus nos idées.

Je ne doute pas que pour une cause aussi sacrée que la nôtre, nous ne trouvions les dévouements nécessaires, nous en avons déjà, nous en aurons d’autres qui viendront nous renforcer.

Et ainsi, accomplissant chacun notre devoir, nous aurons facilité la tâche de ceux hommes qui luttent et parfois meurent pour que le monde soit libre et pacifié entre les peuples entre les races entre les hommes.

Lazare Rachline
Chef à la propagande

PS Mon vieux Simon, en apportant ce correctif et cette fin à mon rapport, je m’aperçois que j’ai tellement d’idées qu’il me faudrait au moins 3 ou quatre fois plus de place pour les exprimer, aussi je les condense du mieux que je peux, ça semblera un peu décousu, ma foi tant pis. Tu ne m’en voudras pas.

Originaux

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