Lettre de Lazare Rachline à son frère Vila
Correspond à la page : 98Note de l'auteur
Lettre dans laquelle Lazare Rachline attire l'attention de son frère sur la nécessité d'être fort.Retranscription
Le 2 juin 1941
Reçu le 3 juin. Répondu. Lazare m’écrit qu’il vient. J’attends sa venue.
Mon cher Vieux,
Je rentre à l’instant de Vichy où je viens de faire un voyage éclair. J’y ai vu pas mal de gens intéressants et je voudrais bien parler de tout cela avec toi.
Aujourd’hui je reçois également un important courrier de J. Balcaen. Les choses ne s’améliorent pas, au contraire. De plus, Viet ne vient pas non plus. Il prétexte que l’ami qui devait lui procurer les papiers est à la clinique. Tout cela est bien compliqué et je crois que nous nous leurrons si nous croyons que ces Messieurs se dérangeront pour nous.
Si tu écris à Marcel, tu peux sans parler affaires, lui demander de venir, en insistant sur le désir que tu as de le voir. Je sais bien ce que valent nos prières, mais on prie bien Dieu aussi quelque fois !
Pour les titres, le mieux serait pour toi d’aller carrément à une banque importante les apporter et leur demander ce que tu as touché ; c’est ce que j’ai fait.
J’ai écrit à tous les clients et je viens de recevoir en quatre chèques et deux mandats environ 10.000 francs, je te donnerai les comptes quand nous nous verrons, mais je crois que par correspondance on peut obtenir le règlement et cela évitera des frais inutiles.
J’ai une combinaison pour les machines et je t’en parlerai également de vive voix.
A propos de la ligue, je crois que tu as raison et qu’il ne faut pas se bercer avec des illusions. Quelques fois on en a besoin et on passe une bonne journée en écoutant, même quand on n’y croit pas, des paroles de réconfort et d’espoir. Ceci dit, mon moral est toujours excellent et je reste persuadé que ce cauchemar finira bien un jour par faire place à une aube ensoleillée.
Reçue une lettre très gentille de Fermat adressée à nous deux.
Et toi, comment vas-tu ? Est-ce que tu te retapes ? Il le faut car nous allons avoir à être forts.
Sans certitude, nous viendrons à Toulouse Suzanne et moi mercredi ou jeudi ; tu seras prévenu par télégramme. Préviens Sam Rudeski que je le verrai et lui dira ce que j’ai fait avec Germain.
Nous ferons avec toi et Simone un saut vers Marseille et je pourrai enfin terminer mon costume. Et le tien ? L’as-tu ? A te lire.
Nous tous vous embrassons tous.
Ton frère qui est bien petit.
Lazare.