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Interview de Lazare Rachline dans "Le rassemblement ouvrier"

Correspond aux pages : 356, 357

Note de l'auteur

Entretien accordé par Lazare Rachline qui plaide pour l'associations capital-travail.

Retranscription

Nos militants nous parlent de l’association Capital-Travail

Nous commençons, aujourd’hui, la publication d’une série d'interviews de nos militants auxquels nous posons quelques questions sur le problème brûlant de l’Association. Il est probable que pour certains d’entre nous ce problème présente encore des points obscurs. Il est probable aussi que les idées et les suggestions de ceux d’entre nous qui sont vraiment u dans le bain » seront utiles aux travaux du Conseil National qui a été chargé, aux Assises de Marseille, d’élaborer en six mois un projet de loi sur l’instauration obligatoire en France du système de l'Association Capital-Travail.

Nous sommes allés voir d’abord Lucien Rachct, industriel, qui a été chargé, à Marseille, de rapporter la motion Capital-Travail.

Vous avez dit, devant les Assises de Marseille, que le R.P.F. était le véritable héritier du socialisme français. Qu’entendez-vous par là ?

C’est que j’estime que l’Association Capital-Travail, préconisée par le général de Gaulle, sera seule capable, quand elle sera appliquée (et elle sera appliquée) de transformer matériellement et moralenient la condition ouvrière, et c’est en luttant pour cette transformation que nous restons les fidèles héritiers du socialisme français.

Vous avez dit aussi, que les véritables réactionnaires étaient aujourd’hui les communistes.

Oui. Les communistes sont Indifférents au sort de la classe ouvrière. Ils savent bien qu’en Russie, les travailleurs ne possèdent plus les droits qu’ils ont conquis dans les démocraties et, en particulier, celui de faire grève ou de travailler là où Ils le désirent.

Le régime le plus dictatorial qui soit, avec sa police politique et ses camps de travail forcé, ne fait pas horreur à nos communistes, qui y voient, au contraire, la patrie du socialisme. Leur préoccupation est d’atteindre les objectifs fixés par le Komin-form, peu importent les conséquences pour les ouvriers français. Voilé pourquoi ils sont réactionnaires.

Voulez-vous me dire, maintenant, comment vous voyez, en pratique, la réalisation de l'Association Capital-Travail ?

Cette réalisation pose, naturellement beaucoup de problèmes. Or, il n’est pas question de faire des essais, des expériences. Il faut, dès maintenant, étudier toutes les difficultés et les surmonter pour aboutir. Ce sera là le rôle qui a été confié au Conseil national.

Je comprends qu’il nous soit difficile, en quelques mots, d'épuiser les problèmes dont vous parlez, mais au moins énumérez-moi les objectifs à atteindre.

L'idéal à réaliser c'est la suppression de la condition pro-[...]

Et quelles seront, d’après vous, les proportions ?

Ceci est à mettre au point. Elles pourront être variable-s selon les entreprises et selon les apports.

Il faudra naturellement tenir compte dans les bilans, avant toute répartition, des intérêts au capital engagé, des amortissements, des réserves pour réapprovisionnement, des réserves pour renouvellement de bâtiment et de matériel.

Ainsi, après avoir donné son juste salaire au travail, on donnera le sien au capital engagé.

Et s'il n’y a pas de bénéfices ? S’il y a des pertes ?

Les pertes ne peuvent être supportées que par le capital, le» travailleurs n’ayant engagé que leur travail. Mais aussi la propriété de l’entreprise reste au capital, puisque c’est lui qui peut acheter ou vendre les actions représentant les instruments dû travail, il est assez naturel que ce soit lui qui supporte les conséquences de la bonne ou mauvaise gestion de l’entreprise dans laquelle il s’est engagé.

Au contraire, s’il y a des bénéfices, ceux-ci sont le « fruit » du capital engagé et du travail [...]


En transformant les rapports qui existent actuellement entre de capital et le travail.

En donnant à l’un et à l’autre un statut qui les mettent sur un pied d’égalité. Il faut établir dans les entreprises une hiérarchie légale du commandement et de la rémunération qui en découle, de même qu’il faut séparer ce qui est le travail et son rendement de ce qui est le capital. Et il faut à chacun donner son dû.

On confond généralement le chef d’entreprise avec le capital. C’est une erreur.

Le chef d’entreprise doit être un travailleur comme les autres, payé comme les autres, pour son travail. Il peut être en même temps détenteur de tout ou partie du capital de l’entreprise, ou n’y avoir aucune part, cela ne change en rien son rôle, qui est de diriger et de gérer pour le compte du capital et du travail.

Quel sera l’intérêt des ouvriers ?

Tout d’abord, il faut déterminer des méthodes de travail qui permettent une juste rétribution des rémunérations. Celles-ci doivent comporter :

  1. Le minimum vital ;
  2. La part provenant de la qualification ;
  3. La part proportionnelle du rendement, soit général, soit par équipe, soit personnel.

Ceci doit être établi aussi bien pour le manœuvre que pour le Président directeur général.

Mais il existe déjà des entreprises qui appliquent le « salaire proportionnel » ou d’autres participations. Estimez-vous que c’est cela l’association capital-travail ?

Pas du tout. Comme je vous l’ai déjà dit, il s’agit là de l’objectif numéro 1, qui consiste à ajuster le salaire à la production. En augmentant la production, on doit faire augmenter automatiquement le salaire.

On peut dire que c’est une simple question d’organisation.

Elle postule la participation de chacun et de tous, au profit et à la plus-value de l’entreprise.

Elle ne sera réalisée que lorsque seront placés sur le même plan les apporteurs de capitaux et les apporteurs de travail. C’est-à-dire qu’il devient légal que tout profit et toute plus-value obtenus dans une entreprise seront répartis équitablement entre le capital et le travail.

[...] ou s’il n’y a pas de bénéfices ? N’y aura-t-il pas là des sujets de discorde et de méfiance ?

D’abord, bien entendu, les travailleurs participeront eux-mêmes par leurs représentants au contrôle de la gestion de l’entreprise, à côté des représentants du capital dans une sorte de conseil d’administration réorganisé. Il faudra mettre au point et appliquer à toutes les entreprises un plan comptable obligatoire qui pourrait être parfaitement compris par tous.

Pour conclure cette conversation que nous avons un peu menée à bâtons rompus, je vous dirai que l’Association Capital-Travail CONDAMNERA les entreprises à bien travailler, donc à augmenter la production. Et n’est-ce-pas là l’une des principales conditions du relèvement de la France ?

Originaux

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